Le paradoxe des 180° en réalité virtuelle : pourquoi verrouiller l'attention du spectateur dans un "demi uniVR" ?
La plupart des réalisateurs rencontrés, sans oublier ceux dont je lis les interviews s’évertuent à orienter le regard du spectateur-VR dans la zone des 180° se situant devant lui. Et leur credo est : “dans la vraie vie il ne se passe rien derrière nous”, ou, “dans la vraie vie, on ne se retourne pas sans arrêt…”
FAUX ! Que l’on regarde une série chez soi ou un film dans une salle, on n’est pas dans la vraie vie, c’est clair ! Affalé (ou pas) dans son fauteuil, le regard fixé sur l’écran, on ne bouge quasiment pas. Pourtant, on peut ressentir de plus fortes et plus profondes émotions par rapport à la “vraie vie”, quand le langage cinématographique est maîtrisé (dans les bons films…).
On va me rétorquer que dans la situation VR “ce n’est pas le même problème”… C’est vrai, mais l’excuse des 180° ne tient quand même pas. Avec celle-ci, on rentre dans un paradoxe étrange qui consiste à immerger un spectateur dans un environnement à 360° et à essayer de l’obliger à regarder dans une seule direction. Pourquoi ?
Évidemment, il y a un problème à régler : que faire si le VRonaute rate “l’action décisive” dans la scène qu’il regarde ?
Imaginez un exemple en fiction : version masculine, « l’héroïne a échappé à la mort, sa jupe est déchirée, sa chemise également, ses yeux verts sont pleins de défi et de rage… elle est beeeelle !! » ou la version féminine, « les muscles saillants du héros apparaissent sous son tee-shirt sale et déchiré, ses yeux bleus expriment la force et le désir… il est trooop beauuuu !! »
Oui mais, pendant que je bavais en regardant la jolie dame, l’identité du méchant a été révélée dans mon dos ! Pire, j’ai raté le « twist » (pas la danse, la révélation “tordue”/inversée ;)) qui implique qu’un des super-gentils était le tueur !! Et zut, diantre, fichtre ! Pour rester aussi désuet que poli…
Bon, il y a clairement un problème mais, placer le spectateur-VR dans une situation de visionnage de vidéo « flat » (le coincer dans les 180°) n’est sûrement pas la solution. Si l’on veut bien s’en donner la peine, il y a de nombreuses options et à mon avis la toute première est la notion d’indices narratifs que j’aborderai dans quelques semaines dans cette même rubrique.