Un constat sur l’écriture de contenus immersifs

Un constat sur l’écriture de contenus immersifs

J’ai visionné de nombreuse expériences en VR, et je constate souvent, qu’entre toutes les possibilités offertes par la Réalité Virtuelle, seule l’immersion dans un espace à 360° est utilisée sans profiter d’autres techniques, comme le son spatialisé, ou bien grâce à des idées narratives originales, nouvelles développées par les artistes ‘immersifs” pour soutenir les particularités de ce média. Actuellement, pour beaucoup de productions et par analogie, c’est comme si vous lisiez un livre où ne seraient pas imprimés les verbes, ni les adjectifs. Nous aurions une lecture incomplète et sûrement frustrante.

 

Rapidement, une question s’est nichée dans mon cortex préfrontal : quelle sera la forme définitive que pourrait prendre l’écriture des futures productions en VR ? Car, si la technique s’affine d’année en année et aboutira sûrement sur des outils performant en termes de workflow (rapidité de production, donc d’économie), l’enjeu réel reste bien l’écriture.

Beaucoup (mais pas tous, bien heureusement) d’interlocuteurs que je rencontre, ayant bien souvent réalisé une fiction, un film corporate, ou un documentaire immersif, bottent en touche face à la question de la narration. D’ailleurs, en tant que pionniers, que pensent-ils apporter de nouveau ? Quelle technique utilisent-ils pour maintenir l’attention de l’utilisateur sur le fil narratif du scénario ? Ou plus largement, que fait-on du fil narratif et d’une partie de la réalisation, maintenant que le spectateur peut contrôler le cadrage ?

C’est avec un peu de déception que je ne reçois la plupart du temps, pas ou peu de réponses. Pour l’instant, de nombreux réalisateurs, vidéastes et autres techniciens protagonistes de l’univers à 360°, utilisent les techniques de la narration classique “cinématographique” en les triturant, les obligeant à diverses contorsions afin de modeler leur travail à l’intérieur d’un moule inapproprié, celui de la VR. Quelques techniques « cinéma » peuvent être sûrement adaptées, mais la plupart du temps elles devront être construite de A à Z.

 

Transmettre des émotions à travers une nouvelle technique et lui faire pleinement exprimer son potentiel est un art difficile, car il s’agit d’apprendre un nouvel alphabet, de créer de nouveaux mots, une nouvelle syntaxe. Il est normal, je le comprends, d’essayer, de tester et d’apprendre de ses erreurs.

 

Ce que je conçois moins est de se voiler la face devant la non-utilisation du potentiel du puissant média que nous avons en main. Faire les choses pour faire, produire pour produire n’est pas mon credo et je me demande à quoi servent les films 360° qui n’utilisent en rien les possibilités de la VR.

 

Il est clair que nous en sommes encore à “L’arrivée du train en gare de La Ciotat” des frères Lumière. Et si, à l’instar de ces derniers, nous n’avons pas encore compris les possibilités de notre outil, nous avons malgré tout l’expérience de l’histoire du cinéma pour nous guider dans notre démarche. Il ne s’agit pas de dire que l’expérience sera la même et les solutions identiques, ce serait trop facile…

 

Malgré tout, nous verrons que de nombreuses similitudes nous aideront à construire quelques hypothèses, diriger nos essais, préciser nos tests afin d’éviter de patauger dans l’inconnu et de perdre un temps précieux.

 

Reste à notre charge de nous transformer en Méliès ou Griffith de la réalité virtuelle, de donner ses lettres de noblesse aux mondes immersifs que nous allons créer dans le futur.